Degré 13 : Clonerie humaine
14h38, quai du train Thalys à
Bruxelles.
On m’a réservé une première classe.
Première impression en montant, je
suis entouré de clones.
Les progrès en génétique ont été
plus vite que je ne pensais.
Tous les clones ont levé un œil sur
moi, puis se sont regardés subrepticement pour replonger sur leurs écrans de
portables Hell.
Je me cale dans mon fauteuil Solo.
Ils sont en costumes sombres et
cravates rayées. Je suis en jean et pull camionneur.
Ils ont des chaussures pointues bien
cirées. J’ai des baskets.
Ils ont une oreillette. J’ai une
conjonctivite.
Ils lisent Les Echos ou le
Financial Times. Moi, Le Monde Diplomatique et Alternatives Economiques.
Ils sont rasés de près. J’ai une
barbe de cinq jours.
Ils trouvent normal d’être servis
par une femme sans la remercier.
Je refuse poliment le plateau de
collation.
Je m’endors.
16h05, Paris Nord.
En descendant du train, deux jeunes
maghrébins m’arrêtent. Ils me montrent chacun une plaque, style NYPD.
Des douaniers.
Ils me fouillent sur le quai.
Je déclare une bouteille de
Bordeaux Château Trillon 1990 et un ballotin de pralines belges.
Ils me demandent de retirer les
mains de mes poches.
Mon cœur bât. J’espère échapper à
la fouille anale dans la gare.
Mon sac de sport vomit ses tripes.
Comme
à la fin d'un bon film, les clones s'éloignent vers la réservation de
taxis, tirant sur la poignée de leurs valises à deux roues.
Pendant que des enfants d’immigrés
parfaitement insérés fouillent un paumé, des hommes d’affaires filent en douce,
les poches pleines de devises plus ou moins propres.
To be continued.